Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LA VIE CULTURELLE TURQUE EN FRANCE
LA VIE CULTURELLE TURQUE EN FRANCE
8 octobre 2009

ARA GULER, UN PHOTOGRAPHE ...

Dans Le Monde du 7 octobre 2009

ARA GULER, UN PHOTOGRAPHE PERDU A ISTANBUL

guler12

Ce classique du noir et blanc expose ses photos à la Maison européenne de la photographie et dans une galerie

Comme souvent l'après-midi, Ara Güler, 81 ans, vient s'attabler dans le café qui porte son nom, en plein coeur du quartier animé de Beyoglu, au pied de l'immeuble familial où il a grandi. De là, le photographe regarde bouillonner la jeunesse stambouliote. L'avenue Istiklal déverse des flots colorés de passants bruyants, de taxis jaunes et de vendeurs ambulants. Cette agitation semble laisser Güler indifférent. " Maintenant il n'y a plus rien à photographier, ce n'est plus que le cadavre d'Istanbul. Tout est dans ma mémoire ", dit-il dans un français parfait, levant les yeux vers le ciel.

Il est surnommé " l'oeil d'Istanbul " mais son Istanbul n'existe plus. Ses images en noir et blanc, accrochées sur les murs de son café, ont été prises dans les années 1950 et 1960 au cours de déambulations matinales. C'est un Istanbul cosmopolite, saisi au ras du pavé, enfumé, sombre et pluvieux, brillant de crasse et d'humanité. Une atmosphère nostalgique s'en dégage - le hüzün, sentiment décrit par Orhan Pamuk, l'écrivain stambouliote, comme " le plus fort et le plus permanent de l'Istanbul de ces derniers siècles ".

Le grand choc du passé

A la Maison européenne de la photographie, à Paris, Ara Güler montre en une cinquantaine de photos noir et blanc son Istanbul des années 1950. Déjà, le photographe s'attachait à montrer le grand choc du passé et du présent : dans une image célèbre, prise sous la neige, le tramway s'arrête pour laisser passer une carriole à cheval. Ce n'est pas la modernité qui intéresse ici Ara Güler, mais le monde ancien qu'il capture avant sa disparition. Les ouvriers harassés sur les quais du port, les petites barques de pêcheurs, les maisons de bois branlantes sont invariablement saisis dans une ambiance crépusculaire, rêveuse, d'où émergent les lumières des bateaux ou la silhouette des mosquées. Plusieurs images montrent le pont de Galata qui enjambe la Corne d'Or, avec au premier plan des Stambouliotes pensifs qui observent leur monde en train de changer.

Une autre exposition, à la galerie Paris Globe, montre en parallèle d'autres images, en tirage d'époque, datant des années 1960. Fils d'un pharmacien arménien, Ara Güler a passé son enfance dans le quartier de Péra, le nom français utilisé au début du XXe siècle.

L'immeuble paternel est devenu un petit musée où sont exposées ses photos : vues de " Constantinople ", reportages en Erythrée et chez les chasseurs de tête de Bornéo publiés par Life, Stern ou Paris Match, portraits d'artistes et d'hommes politiques : Dali, Picasso, Maria Callas, Churchill.

Au dernier étage, Ara Güler se réfugie parfois dans son bureau et labo. Flotte une odeur enivrante de produits chimiques et de vieux papiers. Empilées sur des étagères de bois verni, deux à trois millions de photos sont archivées. Les noms des dossiers résument son itinéraire : Aragon, Renoir, Mitterrand, URSS, Jordanie...

" Ara Güler, Lost Istanbul, années 1950-1960 "

Maison européenne de la photographie, 5-7, rue de Fourcy, Paris-4e. Tél. : 01-44-78-75-00. Mo Saint-Paul. Du mercredi au dimanche, de 11 heures à 20 heures. Jusqu'au 11 octobre. Livre " Ara Güler Istanbul ", 184 p., éd. du Pacifique. 35

Publicité
Commentaires
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
Publicité